Sur la longue carrière musicale (1966-2016) du Maître d'École Papa Wemba

Sur la longue carrière musicale (1966-2016) du Maître d'École Papa Wemba

Papa Wemba est le deuxième artiste congolais (le premier étant Tabu Ley Rochereau) à signer avec un éditeur musical international, Real World de Peter Gabriel, avec qui il publiera trois albums : Le Voyageur (1992), Emotion (1995), Molokaï (1998). En 1999, deux de ses titres, Maria Valencia et le Voyageur, sont choisis par le réalisateur italien Bernardo Bertolucci pour son film Paradiso e inferno. Jules Shungu Wembadio Pene Kikumba, dit Papa Wemba, est né le 14 juin 1949 à Lubefu au Congo belge (actuelle province du Sankuru, en République démocratique du Congo). Il meurt le 24 avril 2016 à Abidjan en Côte d'Ivoire d'un malaise cardiaque à l'âge de près de 67 ans, alors qu'il se produisait à la 9e édition du FEMUA. Son malaise a été vu par les téléspectateurs en direct à la RTI (télévision ivoirienne). Chanteur, auteur-compositeur et acteur congolais, Papa Wemba est le cofondateur et dirigeant du label Viva la Musica avec sa maîtresse Shagi Sharufa. Kribios Universal vous retrace la longue carrière du Maître d'école.Papa Wemba au FemuaDébuts en chant (1966-1969)

Son père, ancien soldat qui a combattu dans l'armée belge pendant la Seconde Guerre mondiale, est devenu chasseur. Sa mère est pleureuse professionnelle, élément traditionnel essentiel des soirées funéraires ou veillées mortuaires. En entraînant régulièrement son fils avec elle, elle l'initie à la musique et au chant, ce qui très tôt passionne l'enfant. Il cultive une voix de ténor particulière et devient chanteur en suivant les traces de sa mère. Néanmoins, son père est opposé à ce que son fils devienne musicien et rêve pour lui d'une carrière de journaliste ou d'avocat.

Au milieu des années 1960, il est élève à l'École Pigier à Kinshasa et est chanteur dans la chorale religieuse, en dehors de l'école. En 1966 disparaît le père de Papa Wemba, il s'oriente alors vers la musique populaire kinoise dans son quartier de Matonge, le berceau de la musique congolaise, et prend le pseudonyme de « Jules Presley ».

De Zaïko Langa Langa à Viva La Musica (1969-1977)

En 1969, il est le cofondateur de Zaïko Langa Langa avec Jossart N'Yoka Longo, Evoloko, Pépé Felly et Andy Bimi Ombalé (venu du groupe Stukas). Il quitte le groupe en 1974 pour fonder Isifi Lokolé (en), puis Yoka Lokolé avec entre autres Mavuela et Mbuta Mashakado. En 1977, il fonde Viva La Musica avec sa maîtresse Shagi Sharufa. À la fin des années 1970, Papa Wemba est un des représentants les plus célèbres du mouvement de la SAPE.

Papa Wemba est la vedette des années fin 70 au Zaïre. Entre 1977 et 1980, il cartonne avec des tubes comme: Mere Supérieure, Ebale Mbonge, Mabele Mokonzi, Bokulaka, Soki Bango Te, Princesse ya Senza, Zonga Zonga, Muana Molokaï, Ekoti Ya Nzubé, Aïssa Na Zoé (première version), Fleur Bétoko, Mwanango, Anibo, Chérie Lipasa (avec Koffi Olomidé), Samaritain, Ata Nkalé, Ndako Ya Ndélé (avec Eménéya Djo Kester), Ma Nalo, Élu Sharufa, Île De Gorée, Déception, Lèvres Roses, Ngambo Moko (avec Rochereau et l'Afrisa), Télégramme (avec Simaro), Eve Paradis, Signorina, Amena (duo avec Pepe Kalle), Loni, Jeune 1er, Est-Ce Que Tu Sauras, Mobembo Okendé Djamusket, Antaya (avec Josky Kiambukuta et Lutumba Simaro).

Les années 80 : vedette africaine

En 1980, il sort son premier succès panafricain Analengo. La même année, il fait le tour de l’Afrique avec son tube Analengo, qui se vend à 60 000 exemplaires.

En 1981 des chansons à succès telles : Zéa, Mélina La Parisienne, Ufukutanu, Analengo (version originale) vont faire rage avec d'autres chansons comme: Astrida 2ème version de Olemi Eshar, Yuvisa de Olemi Eshar en collaboration avec le Clan Langa Langa.

Il brille de milles feux entre 1982 et 1983 avec les chansons: Événement, Rendre à César, Bato Ya Masuwa et Efeka Mandundu (avec Wendo Kolosoy), Santa, Matebu Dido Senga, Zéa [deuxième version] (avec Martin Meissonier), Rythm Molokaï, Fleur Betoko [autre version], Muana'ngo (autre version), Bukavu Dawa, Eliana, Ozia, et Lomamie (avec le Clan Langa Langa)

En 1984, il participe activement dans l'album Proclamation de son ami Stervos Niarcos, où il interprète plusieurs chansons entre autres Proclamation, Champs Elysées et bien d'autres. La même, Wembadio chante Malimba (avec Hector Zazou), Miss bessengue et Eben.

L'année 1985 sera marquée par Arc de Triomphe, Faux diamant (avec Lita Bembo, Bozi Boziana et Espérant), Mfumu Yani (version originale), Fille De Sion, Maningo (avec Maziya Leya), Destin ya Moto, Beau Gosse ya Paris et Petite gina (version originale).

En 1986, il sort l'album L'Esclave où il dénonce l'esclavage du peuple africain vis-à-vis des occidentaux. Il s’installe en France et débute dans le cinéma avec La vie est belle paru en 1987, film de Ngangura Dieudonné Mweze et Benoît Lamy. Il compose une bonne partie de la bande originale de ce film.

En 1987, il participe encore dans l'opus Prolongation de son ami Stervos Niarcos où il interprète Dernier Coup De Sifflet, Nostalgie Personnelle, Chérie Adé, Kinshasa Brazza (avec Stervos Niarcos). Parallèlement, il sort Love Kilawu.

En 1988, Papa Wemba fait une tournée internationale, du Japon aux États-Unis en passant par l'Europe, notamment en Belgique. En 1989, il se fait connaître aux États-Unis grâce à la revue Africa Oyé. D'autres disques vont marquer les années 80, nous citons: Bana Viva Fungola Ngai Love Kilawu, Galilée (première version) en 1986, M'fono Yami (1988), Siku ya Mungu, Biloko ya Moto-Adidas Kiesse, Mokili-Ngele (1989).

Deuxième souffle apogée niveau international (1990-2000)

Au milieu des années 1990, il fait la connaissance de l'homme qui va donner un second souffle à sa carrière musicale, Peter Gabriel. Il assure la première partie de sa tournée américaine et européenne en 1993. Il est le deuxième artiste congolais (le premier étant Tabu Ley Rochereau) à signer avec un éditeur musical international, Real World de Peter Gabriel, avec qui il publiera trois albums : Le Voyageur (1992), Emotion (1995), Molokaï (1998). Papa Wemba a alors beaucoup de succès en matière de world music, avec des titres comme Maria Valencia, Yolele, Sofélé...

En 1995, l'album Emotion le révèle au rang des grandes figures de la world music. Deux ans plus tard, Papa Wemba est déclaré meilleure vedette africaine aux Kora 1997. L'album Molokaï, sorti en juin 1998, est le troisième et dernier album de Papa Wemba sur le label Real World.

En 1999, il se produit au Forest National de Bruxelles. La même année, deux de ses titres, Maria Valencia et le Voyageur, sont choisis par le réalisateur italien Bernardo Bertolucci pour son film Paradiso e inferno.

Les années 90 seront marquées par les opus: Foridoles (1994), Pôle Position (1995), Wake Up (Duo avec Koffi Olomidé, 1996), Nouvelle Écriture (1997), Molokaï (1998), Ya Biso Moko avec Nouvelle Écriture (1998), Muana Matebu (1999) et Mzée Fula-Ngenge (1999).

« Affaire des visas » (2003)

En 2003, Papa Wemba est suspecté de se trouver au cœur d'une affaire de trafic de visas et d'aide à l'immigration clandestine, à travers ses tournées musicales entre son pays, la république démocratique du Congo, la France et la Belgique. Le 17 février 2003, il est interpellé à Paris et maintenu en détention pendant trois mois et demi. Le 16 novembre 2004, le tribunal correctionnel de Bobigny (France) le condamne à trente mois de prison, dont quatre fermes déjà purgés en 2003, et 10 000 € d’amende pour « aide au séjour irrégulier de clandestins sous couvert de ses activités musicales ».

Les dernières touches (2000-2016)

Dans les années 2000, infatigable, Papa Wemba sort plusieurs albums entre autres A La Une (2000), Bakala Dia Kuba (2001), Somo Trop (2003), Muana Molokaï (2004), Bazonkion (2005), Bravo l'Artiste (2006), Nkunzi Lele (2007), Kaka yo (2008), Notre Pere (2009), 16e Arrondissement de Modogo Gian Franco (2010), Trait d'union (2011), Maître d'école (2014) et Forever de Génération en Génération en featuring avec Sekouba Bambino, Nathalie Makoma, Mj 30 et Diamond Platnumz (2016). En 2011, il participe au festival Mawazine à Rabat (Maroc).

Homme solidaire et bon team player durant sa longue carrière, Papa Wemba collabore avec Tabu Ley Rochereau et son groupe Afrisa, Martin Meissonier (producteur de King Sunny Adé et de Ray Lema), Peter Gabriel, Ray Lema, Manu Dibango, Koffi Olomidé, Youssou N'Dour, Pepe Kalle, le vieux Wendo Kolosoy, Lutumba Simaro, Kwamy Mussy, et ses vieux copains de Zaïko (Evoloko Jocker, Bozi Boziana, Efonge Gina, Mavuela Somo) les quatuors du Clan Langa Langa, Alpha Blondy, Aretha Franklin participe à l'album Emotion Fa Fa, Lokua Kanza, Angélique Kidjo, Salif Keïta, JB Mpiana, Singuila, Ophélie Winter, Manu Dibango, Jackson Babingui, Youssou N'Dour et l'orchestre Aragon de Cuba.

Avec près de cinquante ans de carrière, il est considéré comme une des légendes de la musique congolaise et africaine. S'il n'est pas le créateur de la rumba congolaise, il en est un pilier, et propulse ce genre à l'échelle internationale. Il participe tout de même aux débuts du soukous. La rumba reste sa référence, malgré le fait qu'il aborde d'autres styles comme, entre autres, le folklore, le rock, le ndombolo et la world music.

Il a été décoré à titre posthume: Commandeur de l'Ordre national de la Côte d'Ivoire et Grand Officier dans l’Ordre national des héros nationaux Kabila-Lumumba en RDC.

Adjuvant KRIBIOS-KAUTA


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